Un nouveau marché pour les agences de publicité et de communication. Et une belle opportunité de développement pour les professionnels de santé.
Dans deux décisions du 15 janvier 2019, l’Autorité de la concurrence estime que l’interdiction générale et absolue de toute publicité imposée aux médecins et chirurgiens-dentistes n’est pas conforme au droit européen.Ces professionnels de santé devraient pouvoir recourir à la publicité dans le respect des règles déontologiques gouvernant leur profession.
La Plainte de GROUPON
Jusqu’à la fin 2017, la société Groupon proposait sur sa marketplace internet des prestations de soins, essentiellement esthétiques, effectuées à prix réduits par des médecins et chirurgiens-dentistes.
La société Groupon a saisi l’Autorité de la concurrence de faits qu’elle estimait constitutifs d’une pratique de boycott mise en œuvre par :
La Plainte de GROUPON
Jusqu’à la fin 2017, la société Groupon proposait sur sa marketplace internet des prestations de soins, essentiellement esthétiques, effectuées à prix réduits par des médecins et chirurgiens-dentistes.
La société Groupon a saisi l’Autorité de la concurrence de faits qu’elle estimait constitutifs d’une pratique de boycott mise en œuvre par :
- Le Conseil National de l’Ordre des Médecins dans le secteur de la promotion par internet d’actes médicaux à visée esthétique ;
- Et par le Conseil National de l’Ordre des chirurgiens- dentistes dans le secteur de la promotion par internet de soins dentaires.
Pour des raisons d’ordre essentiellement procédural, que nous ne détaillerons pas ici, l’Autorité de la concurrente s’est déclarée incompétente pour connaître des demandes de la société Groupon.
Le droit français n’est plus conforme au droit européen
Toutefois, l’Autorité a constaté qu’en l’état, le droit français ne semble plus conforme au droit européen, en ce qu’il édicte, à l’égard des chirurgiens-dentistes et des médecins, une interdiction générale et absolue de toute publicité, de façon directe ou indirecte (articles R 4127-215 et R 4127-225 du code de la santé publique pour les dentistes, et article R 4127-19 du code de la santé publique pour les médecins).En effet, dans deux arrêts récents, la Cour de Justice de l’Union Européenne (CJUE) a jugé que l’interdiction générale et absolue de toute publicité directe ou indirecte faite aux chirurgiens-dentistes méconnaît la directive 2000/31 sur le commerce électronique et l’article 56 du Traité sur le Fonctionnement de l’Union Européenne (TFUE), qui consacre la libre prestation de services (à propos de la législation Belge : CJUE, 4 mai 2017, Vanderborght. C-339/15, EU:C:2017:335 – A propos de l’article R. 4127-215 du code de la santé publique français : CJUE, 23 octobre 2018, RG et SELARL cabinet dentaire du docteur RG., Aff. C-296/18, EU:C:2018:857).
Ces solutions sont pleinement transposables aux médecins, à l’égard desquels le droit français édicte également une interdiction générale et absolue de toute publicité directe ou indirecte (article R 4127-19 du code de la santé publique).
Primauté du droit européen sur le droit français
En outre, conformément à une jurisprudence constante de la CJUE, l’Autorité de la concurrence rappelle qu’en application du principe général de primauté du droit communautaire sur le droit interne, les administrations, les autorités administratives, les tribunaux, sont tenus d’écarter l’application des dispositions nationales qui ne seraient pas conformes au droit européen (CJUE, 9 septembre 2003, CIF, Aff. C-198/01, EU:C:2003:430 ; voir également CJUE, 22 juin 1989, Fratelli Costanzo SpA contre Comune di Milano., Aff. 103/88, EU:C:1989:256).
L’Autorité de la concurrence conclut donc qu’il lui appartiendrait, conformément à la jurisprudence de la CJUE, de ne pas appliquer les dispositions du code de la santé publique incompatibles avec le droit européen.
Nécessité de réformer les textes français
Enfin, l’Autorité de la concurrence insiste sur la nécessité de modifier à brève échéance, les textes français relatifs à la publicité afin d’assurer leur conformité au droit européen dans le respect des principes déontologiques qui s’imposent aux médecins et chirurgiens-dentistes, dont notamment l’interdiction d’exercer la profession comme un commerce, l’indépendance, la dignité et la confraternité.
Une opportunité pour les médecins et agences de publicité
Dans ces deux décisions, l’Autorité de la concurrence s’est finalement déclarée incompétente pour statuer sur les demandes de la société GROUPON, pour des motifs d’ordre procédural que nous avons choisi de ne pas détailler. Toutefois, la motivation de ces deux décisions ne laisse guère de doute sur la position de l’Autorité de la concurrence. Selon elle, les textes français interdisant la publicité aux médecins et chirurgiens-dentistes sont contraires au droit communautaire et sont donc inapplicables par les juridictions et les autorités administratives françaises.
Le gouvernement et les ordres professionnels travaillent actuellement à une réforme des textes applicables à la publicité en vue de l’adoption de nouvelles dispositions dans un délai de six à douze mois. Espérons que ces textes seront rapidement dépoussiérés, et que les professionnels de santé seront enfin bientôt autorisés à faire de la publicité, dans le respect des règles déontologiques gouvernant leur profession.
C’est déjà le cas pour d’autres professions libérales réglementées, comme les avocats.
Une autorisation de la publicité, même très encadrée, constituerait un ballon d’oxygène pour nombre de professionnels de santé, qui se trouvent actuellement dans l’impossibilité de communiquer sur leur activité, et donc de la développer. Ceci est particulièrement vrai pour les professionnels de santé spécialisés dans les actes médicaux à visée esthétique. Cette activité constitue une véritable industrie, créatrice d’emplois et de richesse, avec un fort potentiel de croissance. Il y a bien longtemps que l’industrie pharmaceutique a obtenu l’autorisation de faire de la publicité.
La publicité pour les médicaments est autorisée, mais strictement encadrée. Ainsi, en principe, la publicité à destination du public n’est possible que pour les médicaments non soumis à prescription médicale obligatoire et non remboursables par les régimes obligatoires d’assurance maladie.
Pourquoi ne pas imaginer une réglementation similaire, par exemple, pour les professionnels pratiquant des actes médicaux à visée esthétique ?
Naturellement, l’avènement d’une réglementation autorisant la publicité aux professionnels de santé pourrait également s’avérer une opportunité intéressante pour les agences de publicité et de communication, et constituer aussi un levier de croissance économique pour ce secteur d’activité.
Ces solutions sont pleinement transposables aux médecins, à l’égard desquels le droit français édicte également une interdiction générale et absolue de toute publicité directe ou indirecte (article R 4127-19 du code de la santé publique).
Primauté du droit européen sur le droit français
En outre, conformément à une jurisprudence constante de la CJUE, l’Autorité de la concurrence rappelle qu’en application du principe général de primauté du droit communautaire sur le droit interne, les administrations, les autorités administratives, les tribunaux, sont tenus d’écarter l’application des dispositions nationales qui ne seraient pas conformes au droit européen (CJUE, 9 septembre 2003, CIF, Aff. C-198/01, EU:C:2003:430 ; voir également CJUE, 22 juin 1989, Fratelli Costanzo SpA contre Comune di Milano., Aff. 103/88, EU:C:1989:256).
L’Autorité de la concurrence conclut donc qu’il lui appartiendrait, conformément à la jurisprudence de la CJUE, de ne pas appliquer les dispositions du code de la santé publique incompatibles avec le droit européen.
Nécessité de réformer les textes français
Enfin, l’Autorité de la concurrence insiste sur la nécessité de modifier à brève échéance, les textes français relatifs à la publicité afin d’assurer leur conformité au droit européen dans le respect des principes déontologiques qui s’imposent aux médecins et chirurgiens-dentistes, dont notamment l’interdiction d’exercer la profession comme un commerce, l’indépendance, la dignité et la confraternité.
Une opportunité pour les médecins et agences de publicité
Dans ces deux décisions, l’Autorité de la concurrence s’est finalement déclarée incompétente pour statuer sur les demandes de la société GROUPON, pour des motifs d’ordre procédural que nous avons choisi de ne pas détailler. Toutefois, la motivation de ces deux décisions ne laisse guère de doute sur la position de l’Autorité de la concurrence. Selon elle, les textes français interdisant la publicité aux médecins et chirurgiens-dentistes sont contraires au droit communautaire et sont donc inapplicables par les juridictions et les autorités administratives françaises.
Le gouvernement et les ordres professionnels travaillent actuellement à une réforme des textes applicables à la publicité en vue de l’adoption de nouvelles dispositions dans un délai de six à douze mois. Espérons que ces textes seront rapidement dépoussiérés, et que les professionnels de santé seront enfin bientôt autorisés à faire de la publicité, dans le respect des règles déontologiques gouvernant leur profession.
C’est déjà le cas pour d’autres professions libérales réglementées, comme les avocats.
Une autorisation de la publicité, même très encadrée, constituerait un ballon d’oxygène pour nombre de professionnels de santé, qui se trouvent actuellement dans l’impossibilité de communiquer sur leur activité, et donc de la développer. Ceci est particulièrement vrai pour les professionnels de santé spécialisés dans les actes médicaux à visée esthétique. Cette activité constitue une véritable industrie, créatrice d’emplois et de richesse, avec un fort potentiel de croissance. Il y a bien longtemps que l’industrie pharmaceutique a obtenu l’autorisation de faire de la publicité.
La publicité pour les médicaments est autorisée, mais strictement encadrée. Ainsi, en principe, la publicité à destination du public n’est possible que pour les médicaments non soumis à prescription médicale obligatoire et non remboursables par les régimes obligatoires d’assurance maladie.
Pourquoi ne pas imaginer une réglementation similaire, par exemple, pour les professionnels pratiquant des actes médicaux à visée esthétique ?
Naturellement, l’avènement d’une réglementation autorisant la publicité aux professionnels de santé pourrait également s’avérer une opportunité intéressante pour les agences de publicité et de communication, et constituer aussi un levier de croissance économique pour ce secteur d’activité.
Tribune de Philippe Touitou, Avocat Associé, Legipass, publiée dans les PETITES AFFICHES DES ALPES MARITIMES du 4 mars 2019. Permalien : ici.